dimanche 30 mai 2010

Après les réfugiés politiques, les réfugiés écologiques: la vague a commencé (si, si)

Sur le marché du samedi matin, comme en de nombreux autres lieux de Rome, on croise des émigrés du Bengale, qui font 36 petits métiers de misère: ils vendent des journaux pendant que les voitures attendent au semaforo rouge, ou des gousses d'ail au marché, par 2 dans un petit sac en plastique bien propre.
Ce sont des gens en pleine santé, costauds, et apparemment infatigables; ils sont là parce que la mer entre dans leur pays. Oh, pas de façon spectaculaire, avec un tsunami géant qui emporterait l'aéroport de Dakka... Non, la nappe phréatique faiblissant, les eaux salées infiltrent silencieusement le sol... et le rendent progressivement incultivable. Cela ne se voit pas, ne s'entend pas, ne se filme pas...
Et les gens sont donc obligés d'aller cultiver ailleurs, ou de prêter leurs bras ailleurs. Mais où, dans un pays surpeuplé?
Ils commencent donc tout simplement à abandonner leur pays, et à partir là où c'est possible.
C'est ce qu'on appelle des réfugiés écologiques, ou des réfugiés climatiques. Ils existent, je les ai rencontrés.
On peut supposer que le phénomène va durer, voire s'amplifier...

vendredi 28 mai 2010

Rome vue par un ami de passage

Ce mot tardif pour te remercier, mon cher Jean, pour ce séjour un peu prolongé dans ton palais romain, et pour l'amitié dont ton hospitalité témoigne. Mes remerciements doivent te paraitre lointains, après les nombreuses visites qui se sont succédées depuis.
Cette visite romaine que nous avons renouvelée cette année grâçe à toi constitue un pèlerinage attachant et bien agréable.
Rome a pour les étrangers le charme paradoxal d'une capitale de province, encombrée mais sans stress (peut on imaginer des italiens stressés? Il n'y a rien qu'ils supportent plus mal), pittoresque d'un exotisme d'autant plus dépaysant qu'il est familier, non géographique mais temporel, comme les retrouvailles physiques de racines oubliées.
A défaut d'ouvrir directement le ciel, comme les fresques du père Pozzo, Rome, avec laquelle mes premiers contacts estudiantins ont pourtant été froids - ville bruyante aux artères modernes tonitruantes de moteurs et de klaksons, et aux habitants indifférents - m'apparait aujourd'hui comme une cité à mon image, un peu racornie malgré ses ravalements, nourrie de mythes anciens et trop tournée vers le passé, qui continue pourtant à rêver.
Rome est sûrement plus profonde qu'elle parait, mais elle subit la punition d'une époque qui a voulu séduire la foi par l'apparence, sinon par l'illusion. Pour celui qui passe, elle est la cité des prélats - toges pourpres à l'instar des anciens sénateurs - et des carabinieri, aux bottes lustrées, bouffants de culottes et de moustaches. A la Renaissance, c'était déja un musée à ciel ouvert, même sous les coupoles de ses églises, que l'on visite toujours avec allégresse, sans l'accablement qui, selon Stendhal, submerge les touristes à Florence. Florence est une ville "mondaine", riche et sérieuse, comptable, industrieuse et commerçante, tournée vers le faire et l'avenir, ce pourquoi elle intimide. Rome est ouverte vers l'ailleurs. A la manière des orants de ses tombeaux, pantelants de chairs de marbre, elle veut convaincre de la vanité du monde. Aux croyants elle offre le vertige de ses envols. Mais elle met tant d'affluence, d'abondance, d'exubérance à proclamer la vacuité des choses, que le visiteur finit par se demander si le paradis n'est pas finalement descendu sur terre et qu'on l'y trouve là bas! La figuration romaine du paradis ou de l'enfer ne nous en a t-elle pas finalement dépossédés? Au fond Rome lutte contre le doute (la Réforme est passée par là), alors que Florence ne doute de rien.
Peut être Rome nous offre-t-elle à rebours une leçon d'Islam! Mais elle dispense un tel plaisir, comme les patisseries crèmeuses qu'on y trouve, qu'il n'est plus possible que la gourmandise ou la volupté qu'on éprouve à voir, similaire à celle des extases figurées par les grands sculpteurs baroques, puisse constituer un péché. Si elle n'est une confession, Rome est assurément une absolution. C'est sûrement la raison pour laquelle tant de visiteurs l'aiment et se précipitent sur ses ors, ses ordres et ses marbres.
La visiter de surcroit dans un cadre presque familial et le refuge d'une maison ancienne, encore aujourd'hui pétrie de cuisine domestique, à base de pizzas, de légumes frais, de fromages crèmeux, de charcuterie canaille, de vins charpentés, d'anchois (très) faisandés et d'une solide dose d'ail, confirme le sentiment d'un cadeau divin, dont mon cher Jean, tu t'es fait le définitif et révéré mystagogue. Il est bien agréable d'y être enraciné au terreau d'un immeuble renaissance, des bouchers, des bornes vélocipédiques, et des restaus cacher. Chaque visite chez toi forme un massage de compost indigène, dont on ressort enduit de tomates odorantes, de basilic exquis, de mozarella de bufffala et de thon rouge dont la pêche est proscrite. Quelle volupté de s'associer à l'éradication de races en péril, surtout chez un fonctionnaire international chargé de la préservation des milieux menacés. J'ai pratiqué voluptueusement l'un et l'autre (le massage et l'éradication), non sans me passionner pour la deuxième année consécutive pour le récit en image de notre héroine nationale, fourbement brûlée par ces chacals de ... Il est bon, surtout en milieu étranger, de continuer à entretenir les antagonismes nationaux, sans laquelle l'identité se perd.
Encore merci mon cher Jean pour toute cette voluptueuse pédagogie, et pour ce séjour si parfaitement Romain que j'ai couronné par mes séjours nocturnes dans ta catacombe, dont je suis sorti quasi ressuscité.

Ma fonction internationale m'interdit de révéler à quelle Nation l'auteur fait allusion.

dimanche 23 mai 2010

Entendu de la bouche même d'un collègue africain

"L'homme africain n'est pas prométhéen".
Ce collègue expliquait ensuite ce qu'il entend par là: Prométhée a enseigné aux hommes à utiliser le feu et à devenir industrieux. L'homme africain serait davantage porté à la vision symbolique et aux spéculations religieuses, à la relation et aux perspectives.

vendredi 21 mai 2010

A Naples, avec un chauffeur

Cette fois, Louis va à Naples pour une affaire importante: à son arrivée à la gare, un chauffeur en costume sombre et lunettes fumées l'attend, un panneau à la main marqué d'un signe de reconnaissance: "Louis".
Il monte dans une voiture aux vitres à peine moins fumées, à la carrosserie à peine moins sombre, quand le chauffeur démarre en trombe sous la pluie; il s'engouffre dans un tunnel en sens interdit: les véhicules arrivent serrés en face, à vive allure, mais le laissent passer: chacun sait ici que , quand il pleut, il est toléré de prendre le tunnel à contre sens. (Question: mais si survient un Anglais qui ne le sait pas, et qui roule à gauche?)
Un peu plus loin, le semaforo passe au rouge (feu de circulation): la première voiture est policière, elle s'arrête sagement; la deuxième, juste devant Louis, klaxonne avec rage: les policiers gentiment manoeuvrent pour céder un passage; commentaire du chauffeur:" Il vaut mieux ne pas avoir affaire avec la mafia, les flics ont bien fait de les laisser passer".

samedi 15 mai 2010

à nouveau un cri étrange retentit dans le quartier: "A-o-i- ou",

Est-ce un appel néolithique ? un cri sorti d'un lieu de culte? un touriste qui se fait étrangler ?
Son auteur apparaît: un petit bonhomme, sur une bicyclette presque ante diluvienne, au physique sec et tanné par le soleil. Son véhicule est un atelier ambulant: meule en pierre, casiers, bouteille d'eau... Il crie en fait: "Arrotino", c'est à dire aiguiseur (rémouleur , pour parler français), et passe de maison en maison et s'arrête quand un restaurateur ou une ménagère sort lui présenter des couteaux émoussés. J'ai fait de même et lui ai fait affûter 2 opinels et des couteaux en fer. Il m'a 'estampé' et demandé un € par couteau. J'ai un peu marchandé, puis, sachant qu'après lui il n'y aurait plus de colporteur, j'ai lâché l'argent.
C'est à Marseille, en 1960, que j'ai croisé le dernier ambulant: il criait " u-i-é" et vendait des vitres, savamment accrochées au vélo.

Vraiment, Rome est un gros village, jeté dans la modernité...

mercredi 12 mai 2010

joignez la pétition mondiale contre la faim

Juste un petit clic, c'est en version française, voyez dans la barre du haut pour choisir votre langue
http://www.1billionhungry.org/

Faites pression sur les responsables politiques pour éliminer la faim. Signez la pétition et incitez à l’action, où que vous soyez.

Merci
Jean

jeudi 6 mai 2010

Individualisme romain

Louis et Eugénie habitaient autrefois dans le Transtévère, ils recouraient de temps en temps à une baby sitter: ils finirent par trouver une perle rare, patiente et douce, sachant se faire écouter de leurs 2 filles, disponible et active.
Renseignements pris, ils comprennent qu'Ilaria est docteur en chimie. Pourquoi donc n'a-t-elle pas choisi de valoriser sa spécialisation?
Réponse: "Je ne voulais pas quitter le quartier" (Ilaria est née dans le Transtévère...). Sa soeur est serveuse dans un café voisin...
Voila une belle illustration du particularisme romain: sont prioritaires la famille, la parentée, le quartier, la Ville, éventuellement la Région (Latium) , c'est tout.
Je reconnais que, sur la Côte d'Azur, de semblables choix se remarquent aussi: plutôt devenir artisan à Cannes, que d'être employé cadre à Paris.